La mauvaise blague du jour – suite

On est enfin lundi matin, je peux donc appeler le secrétariat pour demander une nouvelle date pour ce foutu RDV qu’on m’a décalé.

Après 4 appels et 10 minutes d’attente, je parviens à avoir une secrétaire.

Ils n’ont pas encore les nouvelles dates pour les créneaux à venir. Faut donc que je rappelle fin de semaine, avec un peu de chance ils devraient les avoir. Je lui demande si elle sait approximativement pour des RDVs à quelle période ce sera  – « aucune idée ».

Super…. je reste donc dans l’incertitude et le doute.

Par contre mon RDV décalé en août lui est-bien supprimé….

 


Ah et sinon on a traduit la suite des analyses d’autopsie que nous avons reçues – analyses de prélèvements et autres trucs glamour. D’ailleurs au passage merci à Lucienne pour le tips du logiciel OCR 😉

Tout est normal, confirmation qu’il n’y avait pas d’infection ; également les analyses supplémentaires sur le placenta sont toutes normales. Cela ne change donc rien, on reste sans explication.

La mauvaise blague du jour

Enfin le weekend, je rentre chez moi et prends le courrier – tiens une lettre de l’hôpital – probablement une facture pour les analyses faites au service d’immunologie.

J’ouvre la lettre. Non pas du tout, ça vient de la PMA – mon RDV de septembre avec le Dr Hibou est déplacé suite à un contretemps.

Nouvelle date le 19/08.

Au début je me dit chouette, il est avancé de presque 1 mois ! Puis je tique. Forcément en déplaçant les RDV en pleins mois d’août ya des chances que les gens soient en congés.

C’est mon cas, je pars en Suède deux jours avant….

Pourquoi ils ne peuvent pas téléphoner pour vérifier ensemble que le nouveau RDV est ok ???

Je dois maintenant attendre lundi pour appeler, j’espère qu’ils ne me le décalent pas à plus tard que le RDV initial… Une fois de plus je suis blasée par leur organisation….

Le jour d’avant

Depuis début juillet, l’angoisse monte petit à petit. Et depuis le weekend dernier c’est de pire en pire. Car demain, un des pires jours après le mois de mars, est à venir – la DPA de S. Je ne suis pas très productive déjà aujourd’hui. J’ai cette pesanteur sur le cœur qui ne cesse d’enfler.

On a pris congés demain, même si on hésite encore entre rester cloitrés chez nous ou essayer de se paumer dans la forêt (mais avec la canicule ça va pas aider)… la seule certitude c’est qu’on ne veut croiser personne.

Je suis triste, infiniment. Je pense beaucoup à lui, au nouveau-né qu’il aurait du être, à ce qu’aurait dû être notre vie ces dernières semaines et les semaines à venir.

Et à cette vie qu’on se construit dans cet univers qui semble parallèle – un nouveau boulot pour mon homme, des concerts d’artistes que j’adore à foison entre juillet et décembre, un nouveau tatouage et la réflexion sur un autre en hommage à S., des vacances en août sur une île paumée dans l’archipel de Stockholm…

Nous n’avons pas encore envoyé les papiers pour que S. apparaisse dans notre livret de famille (juste savoir que c’était finalement possible nous a beaucoup apaisé). Mais je pense le faire vendredi (pas besoin d’être psy pour voir la coïncidence de base inconsciente entre cette attente et le passage de la DPA…).

Hier nous avons aussi eu la surprise de recevoir un complément au rapport d’autopsie dans notre boite aux lettres…. Mon mari a vite fait traduit ce qui semblait important, ça ne change rien à ce qui a déjà été dit et conclu (je ne sais pas quelles sont ces analyses complémentaires, il l’a fait sans moi et on a pas trop eu l’occasion d’en parler en détail hier soir). Mais on va le traduire intégralement rapidement et on l’emmènera à nos RDVs PMA et immuno de septembre. J’ai pas hâte, faut tout de même retaper tout le texte en finnois à la main pour le passer à la moulinette Google trad, et ensuite avoir à lire les détails…

Je vous laisse sur cette chanson que j’ai écouté en boucle ces derniers mois, car elle me parlait beaucoup –  qui plus est cet album est sorti quelques jours avant la mort de S., alors il l’aura entendu quelques fois quand je l’écoutais dans le tram pour aller au travail le matin, le sourire aux lèvres face à des journées qui étaient bien plus légères.

 

Aimant à femmes enceintes et enfants

Sérieux j’en peux plus, depuis la perte de S., c’est horrible, je me retrouve sans cesse entourée de femmes enceintes et de poussettes.

Certaines me diraient « c’est parce que t’y fais plus attention qu’avant », mais non, c’était déjà une vision pas agréable en PMA, alors je les repérais déjà.

Là ça devient abusé. Si je croise moins de 5 femmes enceintes sur mon trajet travail-maison, c’est une bonne journée…

Et c’est partout… Entre la meuf enceinte de l’immeuble que je croise sans cesse dans l’ascenseur au boulot qui se colle à moi, aux courses où on se retrouve encerclés avec des meufs qui ont leur nouveau-né dans les bras , et le portent à environ 10cm de moi (genre rien à foutre de la zone de distance que les gens tolèrent), les autres qui ont 3 gamins et la meuf est enceinte, etc…

Hier c’était le pire je crois. Je vais boire l’apéro dans un bar, donc je me dis ça devrait aller… Punaise juste après nous débarquent 3 groupes différents avec 3 poussettes de nouveau né et bébé, et deux femmes enceintes. Dans les 10 min, deux autres femmes enceintes passent dans mon champ de vision dans la rue…

J’en peux plus… J’aimerais un peu de répis. Dès que je vois une femme enceinte je sens la haine haine monter en moi (ouaip je sais que c’est fort, mais on contrôle pas ses sentiments…), Mon cœur se brise dès qu’un enfant pleure … Et on parle pas des parents qui se comportent comme des cons avec les enfants et qu’on maudit de ne pas apprécier la chance qu’ils ont, ou de juste ne pas la voir.

Je suis censé faire quoi ? Fuir ? Endurer ?

L’annonce tant redoutée

Décidément, hier fût bien une journée de merde.

Ca commençait mal à cause de la date forcément, pleins d’annonces de décès atour de mes collègues ; et donc forcément ça parle de mort, d’enterrement, et en bonus des phrases à la con mais qui pour moi sont difficile à entendre type  » parfois on meurt plus vite qu’on nait »; « oui ça lui a pas pris 9 mois » (c’était pour parler d’un cancer, entre l’annonce et le décès, mais bon vous voyez bien là où ça peut me faire mal….).

En parallèle de tout ça, j’étais angoissé depuis quelques jours, car l’amie que j’évite m’a recontacté. Je l’évite car en janvier, elle nous avait dit qu’elle avait arrêté la pilule. Donc je savais qu’une annonce allait probablement arriver prochainement, car faut pas rêver, je pense que je resterai la seule infertile de tout mon cercle de connaissance…

Le pire c’est qu’en janvier, quand elle nous a dit ça, je me suis dit « ouf, j’ai échappé à une grossesse de plus pendant la PMA » HAHAHA ma vie est une blague je me suis ensuite dit, elle intervient après la perte de mon fils, ce qui est encore pire ! Comme si DNLP se demandait « mais qu’est ce que je peux lui réserver d’encore pire pour la faire souffrir? » –  Ca me fait penser, étrangement vu que je suis habituée à avoir la poisse et autres, je m’étais dit pendant la PMA « nan mais tu arriveras à tomber enceinte, mais tu vas perdre le bébé. Car sinon ce serait trop facile. Et après tu n’arriveras plus jamais à en avoir » . Vous imaginez que c’est fun quand une partie de ce dont vous avez pensé se concrétise… Bon la suite dans ma tête c’est qu’ensuite mon mari meurt dans pas longtemps d’un cancer/accident de la route, que je choppe une maladie grave et que tous les gens que j’aime meurent jeunes et que je finisse seule etc… OUAIS je suis optimiste avec ma vie ! Bon je vous rassure, j’arrive aussi à reprendre le dessus et me dire que non, ça va bien se passer, enfin j’espère.

Bref une fois de plus je diverge, revenons à nos moutons.

Il y a déjà 3 semaines environs elle m’avait envoyé un sms pour prendre de mes nouvelles, mais je n’avais pas répondu. J’ai attendu, attendu, puis dépassé la limite pour répondre sans que ce soit trop bizarre. Mercredi dernier, elle me revoit un message sur Messenger pour savoir si je vais bien.

Je me triture l’esprit, je sais qu’il faut que je lui réponde. Alors dimanche je lui dit juste les convenances, « ça va mieux, blablabla et toi comment tu vas »; elle me répond des banalités « contente d’être en vacances, on est bien dans la nouvelle maison ». Bref, je ne répond plus, je suis toujours aussi stressé, car il faut que j’aille droit au but, il faut que j’arrive à lui dire ce que j’ai sur le cœur. Alors hier soir je me lance pour me soulager, pour en finir avec ce poids. Je lui explique que je n’ai pas osé prendre de nouvelle car j’appréhendais une annonce de grossesse, car je ne suis pas assez forte pour gérer ça, que je serais incapable de la voir en présentiel car trop difficile pour mois les femmes enceintes et les bébés. Et que du coup le jour où ça arrive je préfère une annonce par message, pour pouvoir encaisser ça dans mon coin. Que malheureusement le jour où ça arrivera on ne se verra peut-être pas pendant un long moment, même si même temps, pour eux je leur espère que ça ne tarde pas trop paradoxalement.

Elle me répond qu’effectivement c’eétait ça hantise de se dire que si ça leur arrive, comment annoncer ça sans trop nous blesser, car elle se doute que ça doit être très difficile pour nous.

Ce message me laisse plein d’espoir, il semblerait qu’elle dise qu’elle ne soit pas encore enceinte ? que je vais encore pouvoir la voir ?

Mais non, quelques minutes plus tard elle me dit « je n’ai pas envie de te mentir et me triture l’esprit depuis des semaines…. mais du coup tu ne vas pas vouloir me voir de si tôt… »

En guise de félicitation j’ai du lui répondre un « tant mieux pour vous ». Et je lui ai dit qu’on garderait contact par message alors, le temps que j’arrive à gérer ça. Elle était soulagée, car elle avait peur que je veuille couper totalement les ponts.

Mais ce matin je me dis que c’est probablement illusoire, est-ce qu’un jour je serai prête à voir un bébé qui aura été conçu le mois après la mort de S. ? (c’est prévu pour janvier, j’ai quand même demandé au lieu de me triturer l’esprit) Un bébé avec un âge si proche ? j’espère 2 choses : que ce ne soit pas un garçon, et qu’il/elle naisse bien en 2020 – pas la même année que S. . Sans ces conditions je vois mal comment reprendre un vrai contact avec elle un jour sans morfler…

Voilà voilà, prends toi ça dans la face. Même si on s’y attendait, ça fait extrêmement mal. Et j’étais en colère. Face à ma vie merdique, pourquoi j’en chie tout le temps ? pourquoi je cumule tout ? infertilité, PMA, perte de mon bébé….. quand est-ce que ça va s’arrêté ? et en plus je dois m’éloigner d’amis que j’apprécie beaucoup pour ne pas souffrir plus…

Alors qu’elle attend patiemment le moment où elle veut un enfant, se marie, construit sa maison, arrête la pilule, et hop 4 mois après elle est en cloque. Et on peut prédire que pour elle tout va bien se passer forcément.

C’est tellement injuste…

Et forcément j’apprend ça alors que mon mari potasse un entretien hyper important pour mercredi, alors je ne pouvais pas lui en parler hier soir, je savais que ça l’affecterait beaucoup trop sinon. Alors j’ai caché mes larmes sous l’eau de la douche, puis j’ai pris un somnifère pour me coucher et dormir sans trop cogiter…

 

4 mois

Aujourd’hui cela fait 4 mois que débutait ce cauchemar éveillé.

On a parcourut un chemin immense depuis, beaucoup plus rapidement que je ne l’aurais pensé. Peut-être parce qu’on est habitué à vivre des choses difficiles, probablement car on a su demander de l’aide immédiatement. Mais il ne faut pas se méprendre, même si on arrive à aller de l’avant, c’est encore souvent difficile, la tristesse et la douleur ne sont jamais très lointaines. Mais on arrive tout de même à vivre malgré tout. Et on s’aime plus que jamais.

 

C’est fou comme le temps s’est immobilisé, comme il passe si lentement alors que par le passé il filait à une vitesse folle et je ne le voyais plus passer. Car on vit l’instant présent au lieu de toujours regarder en avant.

Et cela n’a pas commencer avec la mort de S., mais bien dès le jour où nous avons appris qu’il s’était accroché –  4 mois auparavant, le 12/11….

Tellement de choses se sont passées pendant ces 4 mois où je savais consciemment qu’il était dans mon ventre (car bon les 15 jours entre le transfert et la prise de sang, ce n’est pas vraiment pareil). Je me remémore tous les événements qui se sont passés, les soirées et les moments entre amis et en famille…. Je me souviens de tous ces moments.

Alors que d’habitude je suis incapable de savoir exactement ce que j’ai fait pendant un laps de temps pareil. Nous savourions l’instant présent, chose magique que nous avions oubliée depuis si longtemps –  parfois je me demande même si cela m’était déjà arrivé ?

Puis nous avons appris la mort de S. et ce ralentis du temps est devenu différent. J’ai l’impression que ces événements se sont produits il y a une éternité. Nous avons parcourut tellement de chemin depuis ce 8 mars. Pourtant la route est encore longue, et se dire que ce qui nous a semblé être une éternité, n’étaient que 4 petits mois, à l’échelle d’une vie cela fait peur pour tous les jours qu’ils nous reste à vivre sans lui.

Je ne retiens plus tous ces moments passés entre amis – il y en a eu beaucoup ces derniers temps, depuis que nous avons retrouvé une vie sociale – mais seulement avec les amis très proches, qui connaissent vraiment notre histoire, et avec qui on se sent en sécurité, avec qui on peut passer de bons moments et se changer les idées. Bien évidemment, il y  a encore toujours des moments quand on est avec eux où l’on se met en retrait, où l’on a un coup de moins bien, mais dans l’ensemble on arrive tout de même à profiter.

Avec la famille c’est différent, autant dans les 1ères semaines leur présence a été salvatrice, autant maintenant leur présence est dure -cela nous rappelle sans cesse que la famille n’est pas au complet. Et puis souvent ils manquent de tact, ne comprennent pas que c’est dur de voir mon neveu, ils parlent des enfants et grossesses dans leurs entourages, insistent pour nous voir (ma mère me fait limite du chantage affectif…), etc.… alors on les voit peu pour se protéger. On a essayé il y a 2-3 semaines de faire un repas de famille pour l’anniversaire de ma mère, mais comme on pouvait s’y attendre c’était une erreur, justement pour ce que je viens de citer. C’était un test, on sait maintenant qu’il nous faudra beaucoup de temps pour réussir à vivre ces repas sereinement. Alors on a décidé qu’on n’en ferait plus avant qu’on le sente vraiment, qu’il fallait qu’on se protège, et tant pis s’ils ne comprennent pas.

Dans cette optique, on a aussi décidé de ne pas aller à un mariage d’amis fin août. On ne le sent pas, potentiellement trop d’enfants, des vieilles connaissances qui risquent de poser des questions maladroites, etc… bref même si ça nous attriste de ne pas célébrer ce moment avec ces amis, il faut qu’on se protège avant tout. On souffre déjà assez comme ça. Il faut qu’on leur annonce, cela me fait peur, j’espère qu’ils comprendront.

 

Pourtant, malgré ça je sens aussi un gros changement dans ma tête depuis le RDV immuno de la semaine dernière. On a vraiment passé un cap, finit toutes les investigations que l’on devait faire. Il y a un avant et un après. Je pense à nouveau constamment à S., encore plus que les semaines précédentes où mon esprit me laissait un peu de répit ; mais aussi au désir d’enfant tout simplement. Cette envie viscérale d’être parent qui reprend le dessus, même si notre deuil est loin d’être accompli. Alors je sais déjà que si nous sommes sur la même longueur d’onde avec mon mari (cela sera probablement le cas), que même si ça fait peur, on enclenchera le retour en PMA après les RDVs de septembre, quand tous les feux seront au vert.

Rdv immuno

Mardi soir, soirée extrêmement difficile : je dois me replonger dans mes dossiers, pour faire le tri et regrouper tous les papiers importants – vis à vis de ma santé, de la PMA et de la grossesse…. Forcément je retombe sur le dossier d’admission à la maternité, les photos d’échographies, l’empreinte de son pied… moments extrêmement difficiles.

Mercredi, après une nuit courte et agitée, je suis arrivée à l’hôpital ultra en avance car je n’avais rien compris d’où se trouvait le service. J’avais un peu étudié le plan, mais j’ai bien fait de venir tôt, car ce n’était pas là. J’avais pris ma matinée pour ne pas être stréssée. Mon mari par contre travaillait, donc j’ai fait l’éclaireuse pour lui indiquer où c’était exactement, qu’il puisse venir au dernier moment pour ne pas avoir trop d’heures à rattraper.

J’y avais déjà été il y a plusieurs années – en 2010 j’apprendrai – alors j’ai reconnu l’entrée, puis j’ai demandé mon chemin à l’accueil vu l’immensité de l’endroit – cet hôpital tient plus du hall d’aéroport que du centre de soin !!!

Le professeur a 30 min de retard, il nous dit qu’on peut prendre un café en cherchant la patiente précédente.

Bref c’est notre tour, enfin d’abord moi toute seule, mon mari ne peut pas venir de suite (d’ailleurs le mari précédent s’est énervé à cause de ça). C’est une consultation « grossesse » je vous rappelle (ouaip très très drôle comme appellation…) Donc effectivement ça a tendance à concerner le couple.

Et vous vous en doutez, vu le type de consultation, la femme avant moi est enceinte, les deux après aussi. Ca fait bien bien mal vous imaginez. Je ne peux pas m’empêcher de leur en vouloir, comme toujours. Une part de moi déteste toutes les personnes pour qui ça se passe bien. Je sais c’est con, je sais c’est horrible, mais on ne maitrise pas son inconscient (puis je me rends compte de tout alors ma cause ne doit pas être perdue). Puis à chaque fois on se dit « pourquoi c’est toujours moi qui en chie et pas les autres un peu aussi ». Mais faut se rendre à l’évidence, je suis « les autres » pour tout le monde. Je n’ai personne d’infertile dans mon entourage, personne qui a vécu un deuil périnatal. Alors forcément niveau statistiques, les probas pour que ça tombe sur ma gueule était bien élevées…

Mais vous savez le pire dans tout ça pour ma culpabilité face à ces pensées sombres ? c’est que si ces meufs se retrouvent dans cette consultation, c’est que soit elles ont aussi une maladie auto-immune pas très sympa qui impacte la grossesse; soit elles ont vécu la même chose que moi ; voir les deux. D’ailleurs celle avant moi est venue avec son mari, et sa fille ainée qui devait avoir 8 ans. Vu l’écart entre les deux grossesses, forcément on peut présumer que y’a des trucs probablement pas cool qui se sont passés entretemps. Et vu l’énervement de son mari quand il a appris qu’il ne pouvait pas venir de suite, ça confirme cette piste…. Donc le plus probable c’est juste qu’elles sont plus loin que moi dans le processus, dans la partie où ça va de nouveau mieux. Mais voilà ce matin là, je suis la seule qui est encore dans la tempête dans cette salle d’attente, et c’est dur, alors je déteste la terre entière.

Bref je me recentre sur le sujet.

Hasard total, c’est le même médecin qui m’a reçu il y a 9 ans (alors vous êtes prof d’anglais maintenant  ? Non pas du tout 😅). Très sympa, très drôle, il met à l’aise. Heureusement car je n’en mène pas large, il faut expliquer à la fois des évènements douloureux et mes 4000 soucis de santés et mon dossier médical de 5cm d’épaisseur. Je lui raconte donc mon parcours depuis la dernière consultation (je fais l’impasse sur mes années d’errance médicale sinon on y serait encore), lui parle de mes symptômes, des spécialistes vus, des examens effectués. Il me demande pourquoi je viens dans le cadre d’une « consultation grossesse » – bim l’effet glacial instantané. C’est toujours horrible de raconter cela. Les gens ne sont jamais prêt à se prendre cette histoire en pleine face. Bim une 2e couche quand il me demande pourquoi on était en Finlande – voyage de noces – ah ouais c’est dur… ouaip….

Mais ce que j’ai apprécié c’était son empathie, le choix des bons mots, de cette justesse qui reconnait la douleur mais ne tombe pas dans la pitié. Car c’est horrible d’inspirer la pitié aux gens, c’est dur de la voir une énième fois sur leur visage.

On est pas juste un dossier, il prend mesure de ce que cette épreuve représente pour nous. Et épluche vraiment notre dossier. Après m’avoir auscultée, mon mari peut me rejoindre.

Alors en résumé :

  • Effectivement cela ne peut pas être Goujerot-Sjögren vu les résultats d’analyses. Mais cela ne nie pas que j’ai un syndrome auto-immun, vu mes anticorps et mes symptômes divers et varié. C’est juste qu’il n’est pas rattaché à une maladie précise ou connue (je vous l’avais dit, je la sentais venir cette réponse). Par contre il m’a donné le feu vert pour commencer le Plaquenil (pour mes douleurs articulaires) dès à présent. Je vous avoue qu’on est passé très vite sur cette partie, car ce n’était pas le point principale de cette consultation.
  • Pour lui, la mort de S. n’est pas liée à ces problèmes. Toutefois, il pondère les résultats de l’autopsie : sur certains points, les analyses effectuées ne sont pas très claires (quelles analyses ont été faites sur le placenta; étude du cœur), or ce sont des points importants pour les problèmes causés par certaines maladies auto-immunes. Cependant : cette piste n’est pas privilégiée car je n’ai pas les fameux anti-SSA qui attaquent le cœur du bébé (et normalement même si le problème se développe à cette période de la grossesse il est vrai, cela n’est pas encore léthal à ce stade). Pour le placenta, on ne sait donc pas s’ils ont vérifié qu’il n’y avait pas de caillots à l’intérieur. Bref ce médecin est plus nuancé, plus franc aussi par rapport à la réalité des faits et des doutes.
  • Pour lui, ce serait donc tout de même la faute à pas de chance. C’est moche à entendre, c’est dur de ne pas avoir de réponse, mais en même temps je n’aurais pas été prête à ce qu’on me dise que c’était lié à ces soucis et que rien n’avait été fait pour éviter ce drame.
  • Pour la suite des événements : pour une prochaine grossesse, vu notre passif, il pense prescrire de l’aspirine (pour éviter les problèmes placentaires); et aussi suivi rapproché dans ce service (une consultation par mois à partir de 6-8 SG). C’est un suivi qu’ils mettent en place pour toutes les patientes qui ont vécu la perte de leur bébé pendant la grossesse sans explication claire (et qui ont des soucis auto-immuns). Parait que cet effet « cocooning » fait ses preuves, les patientes sont moins stressées et donc les grossesses se passent mieux.
  • Vu la complexité de notre dossier, il veut tout de même l’amener à leur prochaine réunion de service, pour voir si ses confrères ont le même avis que lui ou non. Il ne voudrait pas se tromper ou passer à côté de quelque chose. Cette partie là m’a aussi beaucoup rassurée, et cela prouve l’importance qu’il accorde au dossier.
  • Cette réunion est en septembre, et donc on le revoit le 25/09 pour débriefer de tout cela. Et comme ça si on a d’autres questions d’ici là, on pourra les poser.

 

C’était un RDV difficile, je n’ai pas appris grand chose en soit, mais cela m’a grandement rassuré pour la suite, quand on retournera en PMA et si par miracle je réussie à de nouveau être enceinte… C’est un peu plus facile d’envisager de reprendre les essais dans quelques mois dans ce contexte-là.

 

La voisine

Depuis quelques temps je l’ai déjà repérée. Cette voisine, qui habite dans l’immeuble adjacent au notre. Avec un ventre rond qui indique que sa DPA ne doit pas être très éloignée de celle qui fut un jour la mienne. Et elle a emménagé ici récemment, je ne l’avais jamais vu auparavant.

Dans une autre vie, nous aurions probablement sympathisé, nous aurions sûrement partagé ses nombreuses promenades de l’après-midi, le temps libre de son congé, des discussions de futures mères puis de jeunes mamans.

Mais dans cette vie je dois me préparer à ce que  dans pas longtemps je croiserai fréquemment son bébé qui aura l’âge qu’aurait du avoir S. Cela m’angoisse déjà, rien que de voir son ventre c’est dur, alors un bébé en chair et en os, plein de  vie, je n’ose même pas imaginer comment je vivrais ces moments….

 

Nous sommes en juillet, mois où il aurait dû naître; probablement le 2e mois le plus dur de ma vie que j’aurais à affronter après mars.